Un pic de chaleur et une percée de la liste des verts aux Européennes : il n’en fallait pas plus pour que l’Exécutif s’active à produire une communication sur l’urgence climatique. On croirait un bulletin de Météo France, mais il s’agit bien d’une communication au Conseil de Paris. C’est l’illustration de cette politique à la petite semaine, sans vision à long terme. Or, lorsque l’on parle de climat, il faut justement avoir une stratégie et une vision qui s’inscrivent dans le temps.

Alors, oui, cette communication, c’est le grand flou, avec une absence de moyens budgétaires pour appliquer cette stratégie qui, en réalité, d’ateliers de végétalisation en permis de végétaliser, ne répond ni à l’urgence climatique, ni aux besoins des Parisiens.

Alors, oui, il y a toujours une certaine constance – il faut vous l’avouer – dans l’utilisation de la novlangue propre à cette majorité, qui nous parle, dans le titre, de « rafraîchissement urbain » ou encore d’ »urbanisme résilient ». Je vous avoue qu’associer la ZAC de Bercy-Charenton à l’urbanisme résilient dans la même phrase, il fallait vraiment être provocateur. Oui, Monsieur MISSIKA, vous me regardez. Il fallait vraiment être provocateur pour aller jusque-là.

C’est vraiment se moquer du monde parce que je vous rappelle qu’avec ce projet, il s’agit de construire 6 tours qui culminent à 180 mètres de haut, complètement enclavées des voies ferrées, du périphérique ou encore de l’échangeur de Bercy. Vous savez très bien que les tours sont énergivores. Le contexte, comme je l’ai dit, ne s’y prête pas. Je vais prendre un exemple très précis. Il y a un an, jour pour jour, nous votions la ZAC de Bercy-Charenton dans cet hémicycle. A l’époque, nous avions proposé différents vœux pour qu’il y ait une étude sur les ombres portées et notamment sur les couloirs de vent, parce que la délibération n’en faisait pas du tout état. Vous nous les aviez refusés. Et aujourd’hui, dans la communication, je lis qu’il est très important de lutter contre les couloirs de vent, parce que ceux-ci participent aux îlots de chaleur. Voilà un exemple parmi tant d’autres des contradictions qui vous font tant d’honneur. Voici, en effet, un exemple de décalage entre les paroles et les actes, mais il n’est pas le seul.

La Ville nous bombarde depuis quelques jours de photos, d’images de synthèse très belles, très léchées de forêts urbaines, qui, comme l’ont dit certains, sont irréalisables pour des raisons techniques ou encore architecturales. Pendant ce temps, l’Exécutif parisien continue de densifier certains endroits, certains espaces de respiration, continue de bétonniser le peu d’espaces qui nous restent, avec des projets en cours. J’ai cité Bercy-Charenton, mais il y en a d’autres plus petits, comme Meunier-Charenton, Netter-Debergue, ou encore tous ceux – il faut aussi le souligner – qui ont été avortés grâce à une mobilisation très forte des Parisiens. Je pense à la place Mazas, au TEP Ménilmontant, d’actualité, au stade Léo-Lagrange, au stade Championnet. Et il y en a bien d’autres.

A ce sujet, j’ai déposé un vœu qui, hélas, n’a pas été rattaché à cette communication. Parce que je comprends qu’en effet, il est toujours difficile de faire face à ses contradictions. Mais j’ai demandé un moratoire sur certains projets pour que l’on ait un fil conducteur et une réelle discussion sur ces sujets de densification.

Et puis, il n’y a pas simplement l’est de Paris qui est concerné. Vous avez aussi l’ouest. Je vais prendre un exemple dans le 17e arrondissement, au 230 rue de Courcelles, où, là encore, il y a un jardin de proximité que vous allez utiliser comme réserve foncière pour y construire des bâtiments. Tout ceci manque cruellement et terriblement de cohérence et de fil conducteur, mais la densification et l’utilisation de ces terrains comme réserve foncière n’est pas le seul bémol à votre politique. Il y a aussi de nombreux retards:

-retard dans le parc social de la Ville, où, en effet, la trésorerie des bailleurs sociaux, en raison des loyers capitalisés, aura du mal à rénover l’ensemble du parc social dans les temps. D’ici à 2020, vous avez 300 écoles qui vont faire l’objet d’un contrat de performance énergétique, soit moins de la moitié des établissements.

-un retard aussi dans les transports. La grande majorité des transports en commun ne sont pas climatisés, et pour cause. La précédente majorité régionale refusait l’installation de la climatisation dans les bus, qu’elle a commandée sous la forte pression des verts, en effet, qui trouvaient que c’était trop énergivore. Nos prédécesseurs à la Région ont fait le choix d’une écologie punitive, qui a rendu ces derniers temps les trajets de bus particulièrement insupportables. En termes de mobilité, la Ville de Paris n’est pas non plus exemplaire, puisque 30 % de ses bennes à ordures roulent encore au diesel.

-du retard aussi dans l’utilisation de matériaux innovants. La question des matériaux utilisés demeure entière. L’asphalte noir continue de régner sur la voirie parisienne. Il a été évoqué des tests, mais sur certains chantiers seulement, avec des matériaux de surface pour améliorer des performances thermiques. Mais aucun plan d’action d’envergure au niveau de la capitale. Prenons un exemple à Toulouse. Un quartier fait l’objet d’un système de climatisation par le sol, par l’installation de pavés poreux qui stockent l’eau de la pluie et la font s’évaporer dès que la température dépasse 18 degrés Celsius. Un autre exemple à Lyon. Des joints poreux ont été placés entre les pavés de la place de Francfort, dans le quartier très minéral de la Part-Dieu, pour constituer une zone perméable pour faire des réserves de chaleur.

Concernant la végétalisation, quant à la réalité de votre création d’espaces verts depuis 2014, la Ville ne fait pas dans la nuance. Il est annoncé 30 hectares supplémentaires sans autre explication, et 20.000 arbres. On voit bien que la Ville favorise la verdure à tous les étages dans les projets architecturaux qu’elle soutient, mais en fait, elle réduit systématiquement les espaces de pleine terre, comme l’atteste le projet Chapelle-Chardon qui réserve 2 % seulement d’aménagement aux espaces verts. Je le répète que la végétalisation en toit, en terrasse ou des murs n’égalera jamais une végétalisation en pleine terre. Nous en sommes convaincus. C’est pourquoi nous avons, avec la Région Ile-de-France, pour le lycée Paul-Valéry, fait un nouveau projet qui conserve entièrement les espaces verts afin de lutter contre les îlots de chaleur.

En conclusion, cette communication est un cache-misère d’une politique qui se dit « écolo », mais qui est en fait une série de mesures bricolos. Faire semblant de verdir la ville pour mieux la bétonner : voilà votre véritable bilan d’une politique en termes d’aménagement de l’espace urbain. L’urgence ne réside donc pas dans une stratégie de rafraîchissement, mais bien dans l’élaboration d’une vision de la Ville au service de la qualité de vie de ses habitants, à travers une politique de logement équilibrée qui fasse une vraie place à l’environnement sous toutes ses formes, définie dans un modèle économique adapté au changement climatique.

Merci.

Retrouvez la vidéo de mon intervention en séance du Conseil de Paris du 08 juillet 2019